Frederic Manning, Nous étions des hommes
Arts Littérature Cinéma / 12 janvier 2016

Nous étions des hommes (Her Privates We) se déroule dans la Somme en 1916, il y a près de cent ans. Frederic Manning, universitaire australien mort dans l’Entre-deux-guerres, décrit là sa propre expérience de la guerre de tranchées. Il a lui-même échappé aux tirs ennemis mais son personnage principal meurt à la fin du roman. Manning ne se soucie pas d’attacher le lecteur au destin de Bourne. Le récit chronologique compte moins que la réflexion métaphysique sur la vie et la mort… Mieux vaut pour les amateurs de suspense et d’aventures épiques se détourner du roman. Nous étions des hommes ne parle presque pas des Allemands. Il y a une situation militaire à peine esquissée au départ. Un régiment britannique combat un ennemi bien retranché, dans un paysage plus rural qu’urbain métamorphosé par les bombardements. Rien n’offre de résistance aux obus : pas plus les hommes que la nature et les constructions qui s’affaissent et dissimulent mal les combattants. Manning ne se donne même pas la peine de présenter une situation stratégique (ou même tactique) de départ pour stimuler l’intérêt. On ne sait pas en lisant vers quoi s’orientent cette poignée de soldats. Les antimilitaristes qui ont trouvé dans Les…

Le temps des ruines (1914-1921) : Emmanuelle Danchin répond à nos questions
Entretiens , Patrimoine , Recherche / 4 janvier 2016

On doit aux commémorations du Centenaire de la Première Guerre mondiale une augmentation du nombre de publications consacrées à la Grande Guerre. Cependant, les publications traitant des conséquences matérielles de la guerre sur le paysage et le bâti sont rares, alors même que les destructions engendrées par le conflit ont été considérables. Chercheure-partenaire au SIRICE (Sorbonne-Identités, relations internationales et civilisations de l’Europe), UMR 8138, Emmanuelle Danchin a publié Le temps des ruines (1914-1921) aux Presses universitaires de Rennes en 2015. Nous lui avons posé quelques questions pour mieux connaître les matériaux qui ont nourri son beau travail historique. Ses réponses très fournies nous renseignent également sur le travail de documentation, d’évaluation, de sélection, d’analyse et de contextualisation des sources. Quelle distinction faites-vous entre « ruine » et « ruine de guerre » ? La « ruine » n’est pas une « ruine de guerre » et il faut opérer une distinction entre l’une et l’autre car les temporalités ne sont pas les mêmes et les représentations iconographiques qui en découlent non plus. La « ruine », en effet, procède de l’usure du temps, elle est le fruit de la lente désagrégation des matériaux. Elle témoigne d’un passé et fait référence à une temporalité, celle du temps long. Il s’agit d’une ruine ornementale, envahie…