Invitation à (re)découvrir In Flanders Fields Museum

18 juin 2012

Le musée In Flanders Fields d’Ypres en Belgique, consacré à la Première Guerre mondiale, a rouvert officiellement ses portes le 11 juin 2012. C’est l’occasion pour les visiteurs de découvrir un aspect de la guerre, méconnu en France mais non en Grande-Bretagne et dans l’ensemble des pays du Commonwealth : la guerre sur le front belge, de Nieuport en Belgique à Armentières en France. Dominiek Dendooven, collaborateur scientifique recherche au musée, a accepté de répondre à nos questions.

Pourquoi avez-vous pris la décision de fermer le musée ?

Il y a plusieurs raisons, à commencer par les aspects pratiques. Quand le musée a ouvert en avril 1998, il était théoriquement conçu pour accueillir 100 000 visiteurs par an. Mais nous n’avons jamais eu moins de 200 000 visiteurs par an, soit le double. Le musée était donc devenu trop petit pour accueillir confortablement le public.

En outre, dans la perspective des commémorations du centenaire de 2014-2018, le gouvernement flamand a décidé d’investir des sommes considérables dans plusieurs projets touristiques et patrimoniaux liés à la Grande Guerre. Afin d’être prêt avant 2014, année au cours de laquelle nombre d’associations et d’institutions feront appel à notre expertise pour réaliser leurs projets, il ne fallait plus attendre pour concevoir un nouveau musée.

Quels ont été les thèmes privilégiés pour le nouveau musée ?

Selon moi, un musée historique sert de médiateur entre les historiens et le “grand public”. Or l’historiographie de la Grande Guerre a bien évolué depuis 1998. Non seulement un bon nombre d’autres disciplines comme l’anthropologie et l’archéologie se sont intéressées à la Première Guerre mondiale mais les historiens ont également abordé de nouveaux thèmes comme la présence de troupes et de travailleurs originaires de l’outre-mer ou le souvenir de la guerre dans sa relation étroite avec l’identité nationale. Il fallait intégrer ces nouvelles façons de voir la guerre dans la scénographie.

Aujourd’hui, le contexte est complètement différent par rapport aux années 1997-1998. Ces années-là, la majorité de nos visiteurs avait connu ou connaissait personnellement quelqu’un qui se souvenait de la Première Guerre mondiale. En 2012, les derniers témoins de cette période ont pratiquement tous disparu. Aujourd’hui pour mon musée, le dernier et l’ultime témoin, c’est devenu le paysage autour de notre ville. Ce paysage conserve toujours les cicatrices de cette guerre tandis que les restes de plusieurs centaines de milliers de morts, originaires de 50 pays différents, y reposent.

C’est pour cela que la nouvelle scénographie met le paysage en valeur, avec ses histoires, les grandes et les petites. Pour cette même raison, la montée dans le beffroi (85 mètres de haut), avec le point de vue qu’il offre sur le champ de bataille, est intégrée dans la visite.

Pouvez-vous en quelques mots nous faire part des ambitions du musée ?

Le musée se veut être une introduction à l’histoire de la Grande Guerre en Flandre occidentale pour un public aussi large que possible. Il raconte donc la guerre depuis l’invasion de la Belgique jusqu’à la commémoration actuelle mais toujours dans une perspective régionale. Mais notre projet vise aussi à adopter une démarche humaniste vis-à-vis de la guerre en racontant le sort et le destin d’hommes. Il cherche enfin à valoriser le paysage de guerre autour de la ville d’Ypres. Car le vrai musée se trouve là, parmi les 160 cimetières militaire, autant de monuments et autres sites de guerre. C’est à nous de donner le contexte pour permettre au public d’apprécier et d’interpréter ce paysage.

Quelles sont les origines des objets et des documents présentés dans le musée ?

Dans le musée, nous utilisons différents médias : des objets, des photographies, des extraits de films et des prises de son, notamment des témoignages racontés par des acteurs, des maquettes, du multimedia. Les objets viennent de notre propre collection et de la collection de Philippe Oosterlinck, peut-être le plus important collectionneur privé en Belgique pour ce qui concerne la Première Guerre mondiale. Notre collection contient également de beaux ensembles de photographies et de documents, ainsi que des centaines de “dossiers personnels”. Ces-derniers contiennent des renseignements biographiques et des documents personnels de soldats et d’autres hommes et femmes qui ont séjourné dans les alentours de Ypres pendant la Première Guerre mondiale. Ils forment la base des “rencontres personnelles” dans le musée : chaque visiteur “rencontre” quatre personnages réels ayant passé (et trop souvent morts) dans notre région. Le « bracelet à chip » qui fonctionne comme droit d’entrée nous permet même de lui offrir quatre histoires adaptées à son profil. Par exemple. un visiteur de la Haute-Garonne aura au moins une histoire d’un soldat du même département, un visiteur danois aura au moins une histoire d’un Danois.  Outre ces dossiers personnels, dont 90 % nous sont fournis par des membres de famille, le musée possède également une collection de dizaines de milliers de photos aériennes. Celles-ci nous ont permis d’élaborer une application “In Flanders Earth” (comme Google Earth) sur laquelle le visiteurs peuvent explorer la province de Flandre occidentale pendant la Première Guerre mondiale. Pour chaque mètre carré de photo aérienne d’aujourd’hui, on peut superposer au moins une photo aérienne de 1914-1918, permettant d’explorer le paysage d’antan et de le comparer avec ce qu’il est devenu aujourd’hui.

 

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