Messieurs les officiers, vos papiers s’il vous plaît !
Archives , Généalogie , Recherche / 16 juin 2013

Il y a quelques mois, dans l’article intitulé Officiers en série, nous avons vu comment rechercher le dossier d’un officier de la Première Guerre mondiale dans les archives du Service historique de la Défense. Entrons aujourd’hui à l’intérieur des dossiers, pour comprendre les pièces qui les constituent. Les dossiers individuels des officiers (de l’armée active et de la réserve) se caractérisent par leur homogénéité et leur fiabilité. Ils se distinguent des dossiers de carrière des Affaires étrangères ou de l’Instruction publique, par les pièces qui les composent. Ces dossiers ont permis à l’État de garantir les droits des officiers, de contrôler un corps qui peut éventuellement représenter une menace pour la République et de veiller au recrutement et aux carrières de ces hommes sur lesquels il doit compter. On a donc là une source rigoureuse, dont l’exploitation requiert toutefois une grande prudence. Les dossiers de pensions et de carrière des militaires s’étoffent et se structurent progressivement au cours du XIXe siècle. Au lendemain de la guerre franco-prussienne de 1870-1871, le processus s’accélère à cause de l’augmentation des effectifs de l’armée et de la nécessité pour l’État de connaître individuellement chaque cadre. Les dossiers se standardisent. D’un même format, ils sont…

L’armée, l’Eglise et la République de Xavier Boniface
Recherche / 5 juin 2013

Xavier Boniface, professeur à l’Université du Littoral Côte d’Opale, est connu pour ses travaux sur le fait religieux dans les armées. Dans son dernier livre, il s’intéresse aux relations entre l’Église, l’État et l’armée de 1879 à 1914. Nous lui avons demandé de nous parler des sources qui lui ont permis de mener son travail et nous l’avons interrogé sur les archives de l’aumônerie militaire pendant la Grande Guerre, à l’heure où celle-ci s’organise pour commémorer le centenaire (voir l’article de La Croix du 20 mars 2013). Dans votre dernier livre L’armée, l’Église et la République (1879-1914), vous montrez à plusieurs reprises qu’il est possible d’entrevoir les orientations religieuses et politiques des officiers (p. 184 et suivantes). Pouvez-vous nous indiquer quelles ont été vos sources et quelles informations vous en avez retirées ? En fait, une majorité d’officiers ne semblent pas s’intéresser, ou seulement de loin, aux questions politico-religieuses. Pour les autres, on peut connaître leurs idées à travers les écrits que certains d’entre eux ont publiés. Des archives familiales privées sont  – dans les rares cas où on en trouve ! -, de précieuses sources. Les rapports des préfets, demandés à partir de 1902, donnent aussi quelques renseignements, mais…

Chtimis prisonniers de guerre : photos de groupes

Pendant la Première Guerre mondiale, les captures de soldats ont été massives. En 1918, près de 7 millions de militaires sont prisonniers en Europe, en Outre-Mer et en Amérique du Nord. Les prisonniers français ont formé l’un des plus gros contingents de ces infortunés, puisque plus de 600 000 soldats français ont été retenus en Allemagne principalement, mais aussi en Bulgarie et en Turquie. En France, ces hommes ont longtemps été suspectés de non combativité, voire de lâcheté. Pourtant, les conditions de vie dans les camps ont été très difficiles, notamment en raison des privations, du manque d’hygiène, des maladies, du travail obligatoire ou encore des punitions. Plusieurs milliers d’entre eux sont morts en captivité. La nécropole nationale de Sarrebourg, où domine « Le Géant enchaîné » du sculpteur et ancien prisonnier de guerre Frédy Stoll, rassemble les corps de plus de 13 200 soldats français décédés en captivité (les noms ici sur MémorialGenWeb). Les images concernant les prisonniers de guerre en captivité sont peu nombreuses. Elles sont rarement le fait des captifs et ont davantage servi la propagande des « geôliers ». Les cartes-photos ci-dessous en sont probablement un exemple. Une fois n’est pas coutume, ces photos contiennent des informations précieuses inscrites sur…

La Grande Guerre à Londres. Suivez le guide !

Londres n’a pas connu les destructions des villes du front. Tout au plus la ville a-t-elle été victime de plusieurs raids aériens allemands, qui ont occasionné la mort de plusieurs centaines de personnes. Pourtant, la Grande Guerre est partout à Londres. Cette forte empreinte montre combien le conflit a marqué la conscience collective des Britanniques. Ainsi, les nombreux monuments et les magnifiques collections de certains musées londoniens ont de quoi satisfaire les passionnés de la Grande Guerre. En voici une sélection. Plusieurs musées consacrent une partie de leurs collections à la Première Guerre mondiale. Le plus connu est évidemment l’Imperial War Museum, qui ne concerne pas uniquement la Grande Guerre. Les expositions de divers matériels (tanks, avions, canons, uniformes, etc.) et les nombreux documents (films, photographies, archives, témoignages de vétérans) méritent le détour. Une tranchée est reconstituée : elles éveillera les sens ! Beaucoup moins connus sont le National Army Museum, le Guard’s Museum et le Royal Air Force Museum. Enfin, un thème « War and Memory » dans la partie 1900-1960 de la Tate Britain revient sur la Première Guerre mondiale dans l’art britannique au travers notamment des œuvres du peintre Richard Nevinson (1889-1946), du sculpteur Charles Sargeant Jagger (1885-1934) ou…

Who’s absent ?
Archives , Sources figurées / 21 avril 2013

Nous prenons quelques jours de vacances et cette fois nous l’annonçons par voie d’affichage. C’est l’occasion de mettre en valeur ce média. Des milliers d’affiches ont été diffusées pendant la Première Guerre mondiale. Tous les belligérants ont massivement utilisé ce mode de communication, principalement pour le recrutement militaire, les emprunts de guerre et la propagande. Pour en savoir plus sur les affiches dans la Grande Guerre, voici une sélection subjective de liens utiles. En France : L’Historial de la Grande Guerre propose une synthèse sur les affiches de 1914-1918. Les archives départementales de la Seine-et-Marne ont mis en ligne 404 affiches de la collection Taboureau. Le site de la mission du centenaire a consacré deux pages fort intéressantes aux affiches grâce à la collection privée de Pierre Grézard :  les enfants dans les affiches de la  Grande Guerre et les régions dans les affiches de la Grande Guerre. L’approche de L’histoire par l’image est originale avec cet article sur la permanence de l’imagerie de la Grande Guerre dans les affiches politiques. Les archives départementales des Bouches-du-Rhône proposent un dossier « La guerre 1914-1918 en affiches » avec des analyses de documents sur divers thèmes (la mobilisation économique ; le laboratoire, l’usine, la…

C’est l’histoire d’un poteau-frontière…
Musées , Objets / 16 avril 2013

Une fois n’est pas coutume, je vous propose de nous intéresser à un objet de la Grande Guerre. Les collections du Musée du Souvenir des écoles militaires de Saint-Cyr Coëtquidan sont composées de milliers d’objets (uniformes, médailles et décorations, iconographies, armes et tableaux) et de documents (archives, livres, photographies, dessins). Le musée a été inauguré par le président de la République Armand Fallières à Saint-Cyr-l’Ecole le 24 juillet 1912. Dans le cadre de mes activités de recherche, je me rends souvent au musée du Souvenir, notamment pour consulter les riches archives laissées par les promotions de La Spéciale. Parmi les 3 000 objets exposés, certains ont une histoire extraordinaire, comme la tabatière du tsar Nicolas II ou la bicyclette de la Mission Marchand. Le poteau-frontière allemand fait partie des curiosités du musée. L’objet, d’une hauteur de plus d’un mètre, est légendé comme suit : « Poteau frontière enlevé près de Pfetterhausen (Alsace) 1914 par les troupes du général Jullien, ancien commandant en second de l’École spéciale militaire de Saint-Cyr, 1911-1912« . Telle était déjà sa description lors de la visite du président Poincaré à l’École spéciale militaire en 1919, comme le rapporte le Petit Parisien du mardi 8 juillet 1919. Pourtant les…

Wikipasdecalais engagé dans la Grande Guerre

Le temps de l’internaute, simple consommateur de documents d’archives en ligne, n’est plus, depuis que les internautes et les services patrimoniaux collaborent pour décrire le patrimoine, l’enrichir et le contextualiser, dans un esprit de partage. Divers projets illustrent cette évolution majeure depuis quelques années. Nous avons demandé à Ivan Pacheka, un des administrateurs de Wikipasdecalais, de nous présenter les projets du Wikipasdecalais concernant la Grande Guerre. *** L’encyclopédie collaborative en ligne du Pas-de-Calais, Wikipasdecalais, mène deux projets autour de la Grande Guerre qui mobilisent de manière complémentaire les sources d’archives publiques et privées : l’établissement de notices biographiques pour les quelques 35.000 victimes militaires du Pas-de-Calais, dont plus de 12.000 sont déjà en ligne ; et le projet intitulé « Un nom, un visage, une histoire », qui prévoit la collecte de fonds privés pour enrichir ces notices, mais aussi la publication de documents originaux accompagnée de leur transcription. Les notices et leurs sources Les notices biographiques, qui portent actuellement sur les soldats morts au combat, mais qui pourront s’ouvrir par la suite à l’ensemble des militaires ayant participé au conflit, croisent essentiellement trois sources d’archives publiques : Le fichier des morts pour la France. Les registres matricules militaires. L’état civil des communes. La transcription…

Les brigades russes dans les archives de la Guerre
Archives , Recherche / 24 mars 2013

Pendant la Première Guerre mondiale, quatre brigades russes sont intégrées dans l’armée française et combattent sur les fronts de l’Ouest et d’Orient. Cependant, après le déclenchement de la Révolution russe en 1917, ces soldats deviennent suspects aux yeux des Français, qui les retirent du front. Après la révolte et la répression du camp de La Courtine en septembre 1917, les contingents russes en France et à Salonique sont dispersés. Certains soldats continuent à se battre dans l’armée française (dans la division marocaine notamment) tandis que d’autres sont employés dans des compagnies de travailleurs à l’arrière ou en Afrique du Nord. De cette histoire, il reste encore de nombreuses traces qui sont présentées ci-dessous brièvement. Avant de commencer ses recherches au Service historique de la Défense, le chercheur doit s’approprier le plan de classement des archives de la Guerre. Les archives militaires sont classées par producteur au sein de séries chronologiques (1). La série N, qui couvre la IIIe République, reflète l’organisation politique de l’Etat et de l’armée : le ministre de la Guerre et son cabinet, les conseils supérieurs, l’état-major de l’armée, les archives des unités (armée, corps d’armée, division, brigade, régiment, etc). L’historien qui s’intéresse aux brigades russes en…

BD et histoire : « Le soldat inconnu vivant »
Arts Littérature Cinéma / 25 février 2013

En août 2002, l’historien Jean-Yves Le Naour publiait Le soldat inconnu vivant, l’histoire incroyable de ce soldat, Anthelme Mangin alias Octave Monjoin, amnésique et inconnu, découvert sur un quai de gare au début de 1918. Dix ans plus tard, cette étude historique est adaptée dans une bande dessinée cosignée par Jean-Yves Le Naour et par l’illustrateur et scénariste Mauro Lirussi. On peut écouter en podcast ici les réponses apportées par Jean-Yves Le Naour aux questions de Collin et Mauduit dans Downtown sur France Inter en décembre dernier (pour les plus pressés, l’interview commence au bout de 20’50 » d’émission). On peut également voir cette courte vidéo mise en ligne par les éditions Roymodus, qui permet de découvrir l’album en deux minutes trente. Nous avons nous-même posé quelques questions à Jean-Yves Le Naour sur cette expérience originale d’écriture et de représentation de l’histoire. ** Pouvez-vous nous expliquer quelle a été la collaboration entre l’historien et le dessinateur ? Quand on n’est pas à la fois auteur et dessinateur, la BD est un ouvrage collectif qui nécessite un vrai travail de collaboration. Il ne faut pas croire que les phylactères appartiennent à l’auteur et le dessin au dessinateur, les choses sont en effet plus…

Justice militaire : André Bach répond à nos questions
Archives , Recherche / 12 février 2013

Nous avons déjà évoqué sur ce blog les conseils de guerre des régions à travers l’exemple de Rennes (voir ici). La récente parution du livre du général André Bach, Justice militaire 1915-1916, nous permet d’approfondir notre connaissance de cette institution pendant la guerre. André Bach a été chef du Service historique de l’armée de terre. On lui doit notamment Fusillés pour l’exemple et L’armée de Dreyfus. Avec ce nouveau livre, l’auteur nous transporte au cœur de la machine judiciaire militaire française, dont il nous montre les évolutions pendant une partie de la guerre, y compris dans une dimension politico-militaire. Il soulève la question de la survie des institutions de la République, et plus largement du système démocratique, en temps de guerre. Justice militaire est un livre passionnant. On retrouvera l’interview qu’André Bach a accordé à Rémy Porte sur son blog Guerres et conflits. Pour notre blog, il a bien voulu répondre à quelques questions en lien avec les sources et partager sa conception du travail d’historien. ** L’informatique et internet ont transformé les méthodes de travail des historiens. Pouvez-vous nous en dire plus sur la base Access des condamnés à mort ? Peut-on envisager une mise en ligne de cet…