Les Américains dans la Grande Guerre : Bruno Cabanes répond à nos questions.
Entretiens , Lectures , Sources figurées / 23 avril 2017

La commémoration du centenaire de l’entrée des États-Unis dans la guerre s’est traduite par la publication de plusieurs ouvrages en France. Le dernier livre de Bruno Cabanes, Les Américains dans la Grande Guerre, a retenu mon attention. Cette synthèse portant sur un sujet encore méconnu en France est accompagnée d’une riche iconographie, bien mise en valeur dans ce bel album publié chez Gallimard. L’historien Bruno Cabanes occupe la chaire Donald G. et Mary A. Dunn d’histoire de la guerre moderne à l’Ohio State University (Etats-Unis). Il a bien voulu répondre à nos questions. 1/ Pourquoi écrivez-vous de la Première Guerre mondiale qu’elle est « la guerre oubliée de l’Amérique » ? L’histoire de la Grande Guerre est méconnue de la plupart des Américains, qui l’étudient peu au cours de leur scolarité et pour lesquels elle représente un conflit lointain. Cela peut paraître d’autant plus étonnant que 1917 marque une coupure importante dans l’histoire militaire et internationale du pays, les Etats-Unis accédant véritablement à un rang de première puissance mondiale, et l’armée américaine devenant, en l’espace de quelques mois, une armée moderne, mieux entraînée et mieux équipée. On dit parfois qu’il y a trois conflits omniprésents dans la mémoire collective des…

Les abris en béton de la Grande Guerre en Flandre française. Un type de fortification de campagne.
Uncategorized / 6 avril 2017

Les zones touchées par la Première Guerre Mondiale conservent encore de nombreux témoignages des combats. Les cimetières militaires et les mémoriaux, définitivement élaborés dans l’après-guerre, sont les plus remarquables. D’autres éléments, disposant d’un fort potentiel d’évocation, sont également à signaler. Il s’agit des traces ou des vestiges de l’activité guerrière, dispersés dans les paysages de l’ancien champ de bataille. Les « blockhaus » occupent une place majeure dans cette catégorie, notamment en Flandre française. Ces ouvrages d’architecture militaire, construits en béton armé pour fortifier les positions, constituent aujourd’hui un patrimoine relativement important du point de vue quantitatif. Édifiés par milliers pour protéger les hommes et matériels durant la guerre de position, ils devaient tous disparaître lors de la remise en état des terrains qui a suivi le conflit. Cependant, pour des raisons techniques ou pratiques, beaucoup ont échappé au démantèlement, permettant aujourd’hui, au promeneur averti, une exploration historique très concrète. Si certains sont présents au milieu des champs, d’autres sont dissimulés dans l’épaisseur des haies, dans des jardins privés, sous le couvert de taillis ou carrément incorporés dans la structure d’habitations ! Les auteurs du livre et les bénévoles de l’A.T.B.14-18 (une association valorisant l’histoire et la mémoire de la Première Guerre Mondiale…

La numérisation du patrimoine écrit de la Grande Guerre : Laurent Veyssière répond à nos questions
Archives , Bibliothèques , Entretiens , Patrimoine / 26 février 2017

En novembre 2016, la Mission du centenaire de la Première Guerre mondiale publiait un état des lieux et proposait des perspectives au sujet de la numérisation du patrimoine écrit de la Grande Guerre. Pour en savoir plus sur ce rapport, nous avons interrogé l’auteur de ce rapport, Laurent Veyssière, conservateur général du patrimoine et directeur général adjoint de la Mission du centenaire de la Première Guerre mondiale. Pourquoi la France est-elle un pays leader en matière de numérisation du patrimoine écrit ? La France, État et collectivités territoriales, s’est engagée résolument dans une politique de numérisation du patrimoine culturel dès les années 1990. En particulier, depuis une quinzaine d’années, la numérisation du patrimoine écrit a pris un essor considérable dans les bibliothèques et les services d’archives. Elle permet à la fois de protéger les collections et les fonds d’archives tout en assurant leur valorisation par une consultation aisée et à distance. Les politiques de numérisation du patrimoine écrit ont beaucoup évolué au fil de ces dernières années, répondant à des enjeux différents entre bibliothèques et services d’archives, mais aussi à des ambitions diverses. La mise en ligne des documents numérisés contribue incontestablement avec succès à la démocratisation culturelle et au développement…

La Guerre civile russe : Alexandre Jevakhoff répond à nos questions
Entretiens , Lectures / 6 février 2017

La Révolution russe est souvent présentée comme l’un des principaux jalons de l’histoire du XXe siècle. Au lendemain du coup d’état bolchevique en octobre 1917, la Russie se désintègre dans une guerre civile, qui dure de l’automne 1917 à l’été 1922. Cette guerre civile, qui ne saurait se réduire à l’affrontement des rouges et des blancs, provoque la destruction et la ruine de l’ancien empire des tsars. Les combats, les exactions, les pillages, les famines, les régimes de terreur, le froid, les maladies font plus de 10 millions de victimes. Jusqu’à présent, aucune synthèse n’avait été publiée en France sur cet épisode tragique de l’histoire russe. Historien et haut fonctionnaire, Alexandre Jevakhoff (Les Russes Blancs chez Tallandier et Le roman des Russes à Paris aux éditions du Rocher) publie cette première étude française à partir des archives russes notamment. Nous lui avons posé quelques questions afin de mieux connaître les matériaux qui ont nourri ce travail historique. Aujourd’hui, la guerre civile russe est méconnue en France. Qu’en est-il en Russie ? La guerre civile a toujours suscité un intérêt considérable en Russie, représentant en quelque sorte le geste fondateur de l’URSS, au moins jusqu’en 1945, quand le stalinisme et l’effet des années…

Bonne année 2017 !
Uncategorized / 2 janvier 2017

Montage de cartons d’entracte destinés aux salles de cinéma. Sur un de ces cartons, un directeur de cinéma adresse ses vœux à sa clientèle depuis le front. Pour en savoir plus, voir la fiche sur Europeana 1914-1918. Nous adressons nos meilleurs vœux à nos lecteurs pour cette année 2017. Gwladys et Michaël

Le temps se mesure à la barbe
Objets / 18 décembre 2016

C’est la première fois que je vois une authentique barbe de « poilu ». Vieille de près d’une siècle, elle est toujours pieusement conservée dans sa boîte d’origine par la fille d’un soldat de la Grande Guerre. Voilà un beau sujet d’article à la veille des vacances de Noël : la barbe du poilu Louis Lecarpentier. Le barbu… Louis Marie Auguste Lecarpentier est né à Tourlaville (Manche) le 1er août 1889. Cultivateur, il est incorporé le 4 octobre 1910 au 2e régiment d’artillerie à pied, au sein duquel il est promu 2e canonnier servant maître pointeur en septembre 1911. Envoyé dans la disponibilité en septembre 1912, il reprend ses activités dans la ferme familiale des environs de Cherbourg (voir la fiche matricule de Louis Lecarpentier aux archives départementales de la Manche). Le 1er août 1914, il est rappelé à l’activité et rejoint le 3e régiment d’artillerie à pied à Cherbourg le 3 août 1914. Les unités d’artillerie à pied ont connu une évolution très complexe depuis le XIXe siècle. Retenons qu’elles sont principalement composées d’artillerie de forteresse et de batteries côtières et terrestres. Le régiment est créé en mars 1910 à partir d’éléments provenant d’un bataillon d’artillerie à pied. Louis Lecarpentier appartient…

Concert du 100e anniversaire de la bataille de Verdun à Rennes
Arts Littérature Cinéma / 4 décembre 2016

Le 13 décembre 2016, à l’occasion du 100e anniversaire de la bataille de Verdun (1916-2016), la Zone de Défense et de Sécurité Ouest, la ville de Rennes et le Centre franco-allemand de Rennes organisent un concert caritatif, s’inscrivant dans la tournée annuelle des concerts Unisson. Le but premier de cette manifestation est de collecter des fonds au profit des familles des soldats tués ou blessés, lors des opérations extérieures. Pour cette soirée franco-allemande, la Musique des Transmissions (ancienne musique de l’Artillerie), placée sous la direction de chefs français (le chef de musique hors classe, Philippe Kesmaecker, et le Major Frantz) et d’un chef allemand, venu de Berlin [capitaine (Hauptmann) Tobias Wunderle], sera accompagnée du chœur d’enfants de la Maîtrise de Bretagne. Au programme du concert figurent des marches militaires, de la musique classique et romantique, ainsi que des chants populaires ou des musiques de film. Pourquoi une telle diversité musicale, avec des œuvres des XVIIIe, XIXe et XXe siècles ? Si dans une telle manifestation, dédiée à la Grande Guerre, il est normal de voir figurer dans le programme musical, pour le côté français, les airs du poilu de Francis Salabert et la sonnerie du cessez-le-feu ou, pour le côté…

La recherche des disparus
Archives , Recherche , Sources imprimées / 13 novembre 2016

En ce 11 novembre, nous proposons de nous intéresser aux disparus : comment s’est organisée la recherche des disparus pendant le conflit ? comment aujourd’hui mener des recherches sur les disparus ? Cet article est le résultat d’un échange avec Jean-Michel Gilot, l’animateur du projet collaboratif « 1 Jour – 1 Poilu ». Il m’a fait découvrir une source méconnue, à savoir La Recherche des disparus, journal de l’association française pour la recherche des disparus, paru entre 1915 et 1917. Il a imaginé un nouveau défi collaboratif consistant à proposer aux internautes d’indexer et d’identifier les disparus figurant dans les colonnes de ce journal. De mon côté, je me suis attaché à en savoir plus sur cette source et  sur son contexte de parution. ** Plusieurs milliers d’Européens, militaires et civils, ont disparu pendant la Première Guerre mondiale. Les combats, les évacuations et les déportations sont les principales causes de ces disparitions. Près de 700 000 soldats sont encore ensevelis sous les anciens champs de bataille, parmi lesquels 250 000 Français (sur ce sujet, on peut voir le webdocumentaire « 700 000 », réalisé par Olivier Lassu à partir de fouilles archéologiques). Régulièrement, des corps sont exhumés à l’occasion de travaux effectués sur l’ancienne ligne de…

Préfets au rapport
Archives , Sources imprimées / 28 octobre 2016

« Dans un rapport en date du 23 août écoulé, j’ai annoncé l’arrivée dans notre port de six barques de pêche belges venant de Calais (…). Cette pêche ne saurait être mal accueillie, en ce moment, par nos populations et, pourtant, quelqu’un qui connaît les susceptibilités de nos cancalaises, dont les maris sont à la guerre, me disait que les belges feraient bien de ne pas présenter trop souvent leurs produits à Cancale ». Extrait du rapport du commissaire spécial de la police des chemins de fer de l’Etat et des ports au ministre de l’Intérieur, le 27 septembre 1915. En avril 2016, les Archives nationales ont mis en ligne les rapports des préfets et des commissaires spéciaux de 1914 à 1919, après les avoir été restaurés et numérisés. Nous n’avions pas encore pris le temps de signaler cette nouvelle ressource, pourtant très intéressante. Un instrument de recherche, accessible via la salle des inventaires virtuelle des AN, facilite les recherches et la consultation des documents numérisés. Une fiche introductive explique la composition et l’intérêt des deux ensembles documentaires : les rapports divers émanant principalement des préfets et des commissaires spéciaux, couvrant l’ensemble du confit et la quasi-totalité des départements (F/7/12936) les rapports des…

Des diplômés au service du renseignement pendant la Grande Guerre
Recherche / 9 octobre 2016

Depuis plusieurs mois, la presse se fait l’écho de l’élargissement du recrutement par les services du renseignement en France. Constatant qu’on se tourne vers « les plus prestigieuses écoles du pays » (France Inter, 6 octobre 2016), des journalistes parlent d’un phénomène nouveau. Pourtant le recrutement de diplômés au profit des services de renseignements, en particulier militaires, n’a rien de neuf. Je me suis beaucoup intéressé à ce qui s’est passé pendant la Première Guerre mondiale sur ce sujet (1) : j’en livre ici une petite synthèse, qui permet de mettre en perspective ce phénomène. Avant la Première Guerre mondiale, l’armée emploie déjà des universitaires et des hauts diplômés au profit de ses services de renseignement. La guerre ne fait qu’accroître ce type de recrutement. Entre 1914 et 1918, plusieurs milliers d’agrégés, de polytechniciens, de normaliens, d’ingénieurs, de centraliens servent, en qualité d’officiers de réserve, dans tous les services de renseignements dépendant du département de la Guerre. C’est au 5e bureau que ce type de recrutement est le plus perceptible. Pour comprendre comment s’opère les recrutements, les dossiers de carrière militaires et civils sont d’excellentes sources. Le 5e bureau : un bureau taillé pour les diplômés En préambule, une courte présentation du…