Depuis plusieurs mois, la presse se fait l’écho de l’élargissement du recrutement par les services du renseignement en France. Constatant qu’on se tourne vers « les plus prestigieuses écoles du pays » (France Inter, 6 octobre 2016), des journalistes parlent d’un phénomène nouveau. Pourtant le recrutement de diplômés au profit des services de renseignements, en particulier militaires, n’a rien de neuf. Je me suis beaucoup intéressé à ce qui s’est passé pendant la Première Guerre mondiale sur ce sujet (1) : j’en livre ici une petite synthèse, qui permet de mettre en perspective ce phénomène. Avant la Première Guerre mondiale, l’armée emploie déjà des universitaires et des hauts diplômés au profit de ses services de renseignement. La guerre ne fait qu’accroître ce type de recrutement. Entre 1914 et 1918, plusieurs milliers d’agrégés, de polytechniciens, de normaliens, d’ingénieurs, de centraliens servent, en qualité d’officiers de réserve, dans tous les services de renseignements dépendant du département de la Guerre. C’est au 5e bureau que ce type de recrutement est le plus perceptible. Pour comprendre comment s’opère les recrutements, les dossiers de carrière militaires et civils sont d’excellentes sources. Le 5e bureau : un bureau taillé pour les diplômés En préambule, une courte présentation du…
Ces derniers temps, on entend beaucoup parler d’une nécessaire collaboration entre pays et entre services dans le domaine du renseignement. Cela m’a rappelé un aspect abordé dans ma thèse soutenue en 2009, qu’il m’a paru intéressant de partager ici. Dans l’histoire du renseignement, l’année 1915 marque un tournant., avec la mise en place d’une centralisation des renseignements au niveau national mais également international. La création du bureau interallié de renseignements procède d’une volonté de coordination de l’action alliée nonobstant les divergences de vues et des objectifs différents. Ce bureau, qui vit au rythme des relations interalliées et particulièrement franco-britanniques, met à disposition des alliés une « bourse de renseignements ». 1915, une année interalliée Dès 1915, des militaires et des fonctionnaires civils français et britanniques militent pour une centralisation des activités de renseignements françaises et interalliées au ministère de la Guerre : Jean Tannery, chef de la section de contrôle télégraphique au ministère de la Guerre, le capitaine Ladoux chef du contre-espionnage au 2e bureau de l’état-major de l’armée ou encore le brigadier général Georges Kynaston Cockerill, director of special intelligence of War Office. Cependant, les autorités politiques et militaires alliées se méfient de ces initiatives, jusqu’à ce que la situation militaire…