« Comme nous ne possédons rien, ou quasi rien, sauf l’existence, la propriété nous semble abolie ; et ce que nous désirons prendre, nous le prenons, sans que l’épithète de voleur nous empêche de dormir. » La Tranchée, 11 février 1916 En 2009, je publiais un article sur « les volontaires latino-américains dans l’armée française pendant la Première Guerre mondiale » dans la Revue historique des armées (n° 255/2009). Depuis, cet article m’a valu d’être contacté par des journalistes sud-américains, preuve que cette histoire intéresse également ces pays, bien que la Première Guerre mondiale apparaisse comme un épisode marginal dans l’histoire de l’Amérique latine au XXe siècle. Plusieurs centaines de Latino-Américains se sont engagés et ont combattu dans les armées européennes entre 1914 et 1919. Mes recherches m’ont permis de découvrir des destins hors du commun. Le péruvien José Garcia Calderón est l’un d’eux : cet artiste et écrivain a laissé un témoignage étonnant sur la guerre. J’ai souhaité en savoir plus sur l’homme et son parcours militaire.Mes deux sources principales ont été la notice biographique détaillée écrite par Francis de Miomandre (1880-1959) dans l’Anthologie des écrivains morts à la guerre et le dossier de carrière d’officier de Caldéron. En effet, tous les volontaires…
Depuis le début de l’année, chaque semaine, les écoles de Saint-Cyr Coëtquidan proposent de découvrir un officier de la Grande Guerre sur leur site internet à partir des fonds très riches du musée du Souvenir (des milliers d’objets, de tableaux et de documents d’archives). Les objets qui sont présentés, parce qu’ils ont appartenu à ces officiers, donnent également lieu à une description. Cette rubrique hebdomadaire ne se limite pas aux saint-cyriens. Le conservateur du musée, l’officier communication et moi-même, qui suis chef du département histoire et géographie, souhaitons évoquer l’histoire des officiers de l’armée française pendant la Première Guerre mondiale, quels qu’ils soient. La diversité des recrutements a toujours fait la richesse de ce corps (Saint-Cyriens, Polytechniciens, Saint-Maixentais, réservistes, territoriaux…). L’objectif de cette rubrique est avant tout pédagogique. Tous les élèves officiers en formation aux écoles peuvent ainsi approfondir l’histoire de la Première Guerre, celle du corps des officiers ou encore les traditions de l’armée française et son patrimoine. Les nombreux témoignages laissés par les officiers de la Grande Guerre sont aussi l’occasion de stimuler la réflexion des élèves officiers sur le sens de l’engagement, la décision, le commandement, la peur, le combat, les relations avec les subordonnés. Pour certains,…
Officier de cavalerie britannique, Edward Louis Spears (1886-1974) rejoint la France à la fin du mois de juillet 1914. Il est affecté au ministère de la Guerre français au moment où l’Europe s’embrase. Après l’entrée en guerre de son pays, il devient officier de liaison entre l’armée britannique et l’armée française et sert notamment à l’état-major de la 5e armée française. Dès le début de la guerre, il est un observateur privilégié, à la charnière du politique et du militaire. En liaison 1914, publié en 1932 et préfacé par Winston Churchill, est un récit qui repose sur ce qu’il a vu, mais aussi sur des témoignages de « témoins oculaires » et sur des documents. Il a beaucoup consulté les archives britanniques et françaises. Ainsi, ce livre est à la fois un témoignage, un essai et une étude historique. Pour illustrer son propos, l’auteur a inséré des cartes et un certains nombres de documents officiels édités tels que des ordres ou encore des notes. L’intérêt du livre de Spears est d’offrir un point de vue britannique sur les premières semaines de guerre en France. Le lecteur accompagne le narrateur au sein d’un état-major d’une grande unité française fortement malmenée pendant la guerre…
Il y a quelques mois, dans l’article intitulé Officiers en série, nous avons vu comment rechercher le dossier d’un officier de la Première Guerre mondiale dans les archives du Service historique de la Défense. Entrons aujourd’hui à l’intérieur des dossiers, pour comprendre les pièces qui les constituent. Les dossiers individuels des officiers (de l’armée active et de la réserve) se caractérisent par leur homogénéité et leur fiabilité. Ils se distinguent des dossiers de carrière des Affaires étrangères ou de l’Instruction publique, par les pièces qui les composent. Ces dossiers ont permis à l’État de garantir les droits des officiers, de contrôler un corps qui peut éventuellement représenter une menace pour la République et de veiller au recrutement et aux carrières de ces hommes sur lesquels il doit compter. On a donc là une source rigoureuse, dont l’exploitation requiert toutefois une grande prudence. Les dossiers de pensions et de carrière des militaires s’étoffent et se structurent progressivement au cours du XIXe siècle. Au lendemain de la guerre franco-prussienne de 1870-1871, le processus s’accélère à cause de l’augmentation des effectifs de l’armée et de la nécessité pour l’État de connaître individuellement chaque cadre. Les dossiers se standardisent. D’un même format, ils sont…
Xavier Boniface, professeur à l’Université du Littoral Côte d’Opale, est connu pour ses travaux sur le fait religieux dans les armées. Dans son dernier livre, il s’intéresse aux relations entre l’Église, l’État et l’armée de 1879 à 1914. Nous lui avons demandé de nous parler des sources qui lui ont permis de mener son travail et nous l’avons interrogé sur les archives de l’aumônerie militaire pendant la Grande Guerre, à l’heure où celle-ci s’organise pour commémorer le centenaire (voir l’article de La Croix du 20 mars 2013). Dans votre dernier livre L’armée, l’Église et la République (1879-1914), vous montrez à plusieurs reprises qu’il est possible d’entrevoir les orientations religieuses et politiques des officiers (p. 184 et suivantes). Pouvez-vous nous indiquer quelles ont été vos sources et quelles informations vous en avez retirées ? En fait, une majorité d’officiers ne semblent pas s’intéresser, ou seulement de loin, aux questions politico-religieuses. Pour les autres, on peut connaître leurs idées à travers les écrits que certains d’entre eux ont publiés. Des archives familiales privées sont – dans les rares cas où on en trouve ! -, de précieuses sources. Les rapports des préfets, demandés à partir de 1902, donnent aussi quelques renseignements, mais…
Pour retracer le parcours des hommes qui ont servi pendant la Grande Guerre, nous avons déjà évoqué les registres matricules du recrutement, mais les dossiers nominatifs constituent également une source précieuse. La journée d’étude sur les dossiers nominatifs au XIXe siècle, organisée au Centre historique des Archives nationales le 24 octobre 2006, a bien montré l’importance des archives administratives du personnel. L’existence des dossiers individuels en France est largement due à la structure centralisée de l’État : produits et gérés par les ministères, ces dossiers constituent aujourd’hui d’importantes séries aux Archives nationales ainsi que dans les services d’archives des ministères de la Défense et des Affaires étrangères (Les recherches biographiques du XIXe au milieu du XXe siècle. État des sources d’archives et des instruments de recherche nominatifs). Au Service historique de la Défense (SHD), dans les fonds de l’armée de terre (les seuls dont nous parlerons ici), la volumineuse série Y est consacrée aux archives du personnel : archives collectives et archives individuelles. Les archives collectives sont constituées de registres, principalement des contrôles de troupes et d’officiers (sous-séries Ya, Yb et Yc). Les dossiers individuels du personnel, dossiers de carrière et de pension, occupent les sous-séries Yd, Ye, Yf, Yg,…
C’est une bonne nouvelle ! La Grande Illusion de Jean Renoir ressort en salle dans une version restaurée inédite. La Grande Illusion retrace l’histoire d’un groupe d’officiers français prisonniers de guerre en Allemagne. Dès sa sortie en France en 1937, ce fut un succès. Film humaniste et pacifiste, La Grande Illusion est aussi un film sur la diversité du corps des officiers en 1914 dont tous les archétypes sont ici représentés : Boëldieu, l’officier de carrière noble ; Maréchal, le lieutenant issu du peuple ; Rosenthal, le Juif ; un instituteur, un ingénieur du cadastre, etc. Redécouvrez ce chef d’œuvre de Jean Renoir dans les salles dès aujourd’hui. Marc Voinchet reviendra sur cet événement dans Les Matins de France Culture vendredi. Enfin, cette semaine, la Fabrique de l’histoire consacre un cycle d’émissions à l’histoire des relations de l’armée à la Nation.